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Date de mise à jour : 30/10/2017 (60 nouvelles épaves, 41 mises à jour)

LA MUTINERIE A BORD DU LENNIE

La Tranche-sur-Mer, 31 octobre 1871
Canada

Missouri
Peinture de E.L. Greaves of Liverpool, England
( photo : courtesy of the Yarmouth County Museum and Archives, Yarmouth, Nova Scotia)

L'histoire

LENNIE, trois-mâts goélette, immatriculé à Yarmouth, Nouvelle-Ecosse.

Parti de Anvers le 23 octobre 1875 à destination de New-York sous les ordres du capitaine anglais Stanley Hatfield avec un équipage de 18 hommes. Les nationalités de cet équipage sont hétéroclytes : Anglais, Grecs, Turc, Belge, Australien, Français, Italien, Danois.

Le 31 octobre, le steward Constant Von Hoydonck est brutalement réveillé par les cris du capitaine :

"oh you are not sailors, you are slaughterers, you are slaughterers..." (oh vous n'êtes pas des marins, vous êtes de sauvages bourreaux)
Des bruits de combats sur le pont, cinq détonations retentissent... Une heure après, l'un des marins s'adresse à Von Hoydonck :

"Here, we are finished now ! " "What have you finished" "The captain and the mates ! Now can you takes charge of ship" "Yes, where do you want to go ?" "Too Greece. Can you take us to Gibraltar, and we'll find Greece" (ici, nous en avons finis maintenant ! "Qu'avez vous fini" « Le capitaine et les officiers ! Pouvez- vous maintenant assumer la charge du navire" "Oui, où voulez-vous aller ? " "En Grèce. Pouvez vous vous rendre à Gibraltar et nous irons en Grèce"

Une partie de l'équipage s'est mutiné et a assassiné le capitaine, le second, Joseph Wortley et le bosco, Richard McDonald.
Le steward Von Hoydonck, découvre sur le pont les trois cadavres couverts de sang. Avec l'aide du garçon de cabine français Henry Trousselot, il rédige 24 messages en français et en anglais contenant le récit des événements et demandant de l'aide. Il les enferme dans des bouteilles. Puis il réussit à les lancer à la mer, à l'insu des mutins.

L'une de ces bouteilles est recueillie, très tôt, près des Sables d'Olonne par un pilote qui transmet l'information aux autorités militaires. Aussitôt l'aviso TRAVAILLEUR, basé à La Rochelle se met à la recherche du navire et l'aborde le 2 novembre en rade de Saint-Martin sur l'île de Ré. Mais les six mutins ont quitté le navire la veille et ont atterri aux Sables d'Olonne où ils prétendent avoir été victimes du naufrage de leur navire le SAINT-GEORGES. Le commissaire de la Marine les prend en charge et les loge à l'Hôtel "La Belle Henriette".

Pendant ce temps le LENNIE, pris en remorque par le TRAVAILLEUR, est arrivé à Rochefort. Fort des témoignages des survivants, le parquet de Nantes ouvre une enquête. Les rescapés signalent que les mutins sont partis à bord d'un canot blanc bordé de noir, similaires à celui des prétendus naufragés du SAINT-GEORGES. Cela suffit aux gendarmes pour procéder à leur arrestation. Ils sont écroués à la maison d'arret de Rochefort et interrogés par le commissaire du gouvernement près le 1er tribunal maritime, M. Brung.

La plupart des inculpés ne nient pas leur crime et confessent même des détails concernant la participation de chacun à cet attentat. Le consul anglais de Nantes réclament leur extradition, arguant qu'il s'agit de meurtres commis en mer sur des citoyens anglais sur un navire sous pavillon anglais. Le Tribunal de Rochefort se déclare alors incompétent.

Travailleur

article

Aviso Travailleur (S.H.M. Rochefort) (1)

Courrier de Bretagne (5 mai 1876)

En mars 1876, sur la plage de La Tranche-sur-mer, arrivent à la côte, un cadavre sans tête et deux têtes tranchées. Le cadavre est celui d'un homme très grand, 1 m 70 sans la tête. Le médecin légiste constate que l'homme a été tué de trois coups de poignard très violents. Les têtes montrent que les corps ont été lestés avec des poids considérables sur leurs cous et que l'agitation de la mer les a probablement détachées des corps. Les anglais dépêchent sur place le superintendant Williamson, accompagné du cuisinier et du steward du Lennie ainsi que du juge de paix de Moutiers. Très vite les témoins admettent qu'ils sont en présence des trois victimes du Lennie.

Dès lors, une partie de l'équipage est remis aux autorités anglaises. Un procès va s'ouvrir à Londres à la Central Criminal Court. Onze prévenus vont avoir à répondre des chefs d'inculpation de meurtre et mutinerie en haute-mer : CALUDIS Pascalis, CARGALIS Matteo, RENKEN Charles, GREEN George, PETERSEN Peter, LETTIS Guiseppe, CAREARIS Giovanni, LEOSIS Paroscos, ANGELOS Georgios, MOROS Giovanni Savos, KAIDA George. Quatre d'entre-eux sont condamnés à mort : Cargalis Matteo, Caludis Pascalis, Kaida George et Carcaris Giovanni. Les autres sont relaxés ou extradés. L'exécution aura lieu le 23 mai 1876, par pendaison, dans la cour de la prison de Newgate. (2)

Equipage du Lennie :

Capitaine Stanley Hatfield, Riverdale, Yarmouth - Joseph Wortley, Belfast, maître - Richard McDonald, St. John, secondmate - Constant Von Hoydonck, belge, steward - Henry Trousselot, 16 ans, français, garçon de cabine - marins grecs : Matteo Cargalis, 36 ans - Leosis Paroscos , 30 ans - Pascales Caludis, 33 ans - Giovanni Saros Moros, 31 ans - Giovanni Carcaris, 31 ans - George Kaida, 22 ans - Georgios Angelos, turc, 19 ans - Guiseppe Lettes, autrichien, 22 ans - Giovanni Canesso, italien, 34 ans - Peter Petersen, danois, 26 ans - Charles Renken, anglais - George Green

Prison de Newgate

La prison de Newgate, Londres

Notes

1. Aviso Travailleur : construit à l'arsenal de Lorient ; 1863, 1863, 03/05/1890) : Aviso à roues [829 t ; 600 cv; IV]. 14/11/1888 : Amène à Bordeaux le 1er équipage du TROUDE ; 1895 : Vendu pour démolition à Rochefort.

2. Newgate : La prison de Newgate fut une prison de Londres, batie à l'emplacement de l'actuelle Haute Cour criminelle de Old Bailey, située au coin des rues de Newgate Street et Old Bailey, à deux pas la cathédrale Saint-Paul. La prison fut agrandie et reconstruite de nombreuses fois, et fut utilisée pendant près de 700 ans entre 1188 et 1902. Les trappes de pendaison étaient installées sur un placher en pin doublé de briques. Avec l'utilisation de la longue corde, la fosse a été approfondie à 12 - 13 pieds. Le gibet était installé dans un bâtiment séparé pour épargner aux autres prisonniers le bruit de l'exécution et rendait plus facile pour le personnel l'enlèvement des corps. Le gibet à Newgate était assez large pour exécuter quatre prisonniers côte à côte, comme dans l'exécution des mutinés du Lennie, le 23 avril 1876.

Sources

Courrier de Bretagne (17/11/1875, 20/11/1875, 29/03/1876, 05/05/1876) ; New-York Times (November 13, 1875, May 22, 1876) ; The National Archives, Kew (HO 45/9394/49876 : Murder on High Seas) ; A Compendium of the Shipping of Yarmouth, N.S. (1761 - 1902) ; Yarmouth County Museum ;